Drame de l’immigration : responsabilités et nécessité de prise de conscience des sociétés civiles d’Afrique et de la diaspora

Des corps de femmes, d’hommes, d’enfants, agglutinés sur cette vaste étendue d’eau, ballottés inlassablement par les flots. Comme si tout en affrontant les éléments naturels, ils tenaient à rester les uns aux côtés des autres.Comme si liés par quelque chose de fort, ils tentaient dans ce silence glaçant, rythmé par le clapotis des vagues, de communiquer et de faire entendre une dernière fois, la voix de ceux qui s’en sont allés.

Portés par les eaux, ils s’échoueront finalement plus tard, sous le regard d’autochtones hagards, s’attelant à les sortir de la vase.

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Nous avons été nombreux à voir ces images, celles face auxquelles on détourne parfois le visage, celles devant lesquelles on se laisse, en l’espace d’une fraction de seconde le regard vide, toucher par une émotion dont on ne saurait se laisser submerger. Ce destin macabre est celui de frères, de sœurs, de pères et de mères, communément affublés du qualificatif « migrants ».

Hormis les rêves et espoirs qu’ils partagent, empreints de perceptions souvent trompeuses, ils viennent parfois de contrées éloignées, mais pour beaucoup d’entre eux, ils sont issus d’un même continent, l’Afrique.

Bien que cela puisse paraître irréaliste, ces scènes pourraient être devenues anodines pour certains, habituelles pour d’autres, et quoique l’on dise, l’on pourrait presque s’accommoder en quelques sortes de ne pas en être davantage concerné. Pourtant, il est question ici d’hécatombe, une autre s’ajoutant à la longue liste de drames connus par ce continent.

La fréquence de ceux-ci aurait-elle eu raison de notre empathie, au point d’être désormais comptés parmi les moins soucieux du sort dramatique connu par les nôtres. Le récit des histoires récentes africaines, entaché de péripéties douloureuses, déshumanisantes et de blessures non cicatrisées, nous aurait-il rendus relativement insensibles et inatteignables par la détresse d’autrui et en particulier par celle des nôtres.

Cela ne saurait-être une excuse suffisante, dans la mesure où la solidarité dans notre humanité est l’élément qui permet de transcender les divergences et de défendre les valeurs communes face à l’adversité. C’est sous son impulsion, que nos ancêtres autrefois dans le pays Manden ont édicté cette charte du même nom, suivis des siècles plus tard dans leur élan par des nations occidentales. C’est elle qui conduit ceux qui étaient autre fois étrangers à notre quotidien, à s’engager pour offrir une dignité à ces hommes et à ces femmes rescapés, ainsi qu’aux dépouilles de ceux n’ayant eu cette chance.

En dépit de toutes considérations qui nous viendraient à l’esprit, comme de vaines dernières tentatives de se justifier en s’épargnant l’once d’une responsabilité, il conviendrait à l’évidence d’assumer là un échec, qui pourrait sans hésitation être qualifié de collectif.

Maintes fois, nous-nous sommes interrogés sur la résonnance au-delà de la méditerranée, de ces conflits meurtriers, s’éternisant avec leurs lots d’insanités et d’exactions de toutes sortes : Adolescent(e)s abusé(e)s, familles décapitées, futures mères éventrées, multiples charniers découverts, comme ces dernières semaines dans le Kasaï. Tant d’actes effroyables qui auraient dû susciter émoi et indignation. Mais qu’en est-il ? Le constat peut être fait par chacun.

Imaginons un seul instant ce qu’un massacre comme celui de Garissa aurait créé comme élan de solidarité,  ou encore ce que la nouvelle des mutilations et des viols subis par ces voyageurs subsahariens sur le sol libyen,  aurait suscité comme choc si les victimes étaient autres, et que ces actes infâmes étaient perpétrés en dehors du continent.

Le subsaharien moderne semble si éloigné de la détresse des siens, et cela à un moment de l’histoire où l’information n’a jamais été aussi accessible à tous, sans distinction et sans discrimination.

Encore plus navrant, à l’image des peuples dont ils sont issus, les élus bien souvent dans leur ensemble, ne font pas mieux.

Inaudibles la plupart du temps sur ces questions, ils le sont peut-être parce qu’il n’est pas commode de s’insurger face à une situation à laquelle l’on n’est pas tout à fait étranger, ou à laquelle l’on pourrait apporter ad arbitrium, de quoi entrevoir une issue meilleure.

Dans ces pays en proie à la folie migratoire, les responsabilités sont à pointer à tous les niveaux de l’appareil étatique.

J’accuse le président, j’accuse les autorités, j’accuse tous ces élus. Tous sans exception, ils vendent et continuent de vendre notre peuple, nos frères, nos jeunes frères, qui ne cessent de fuire leur terre, leur patrie qu’ils aiment tant, pour la route de La mort, cette voie sans issue pour certains car ils ne retrouveront plus jamais cette route empruntée, ce chemin perdu d’avance.

Avant même qu’il le prenne, ce chemin, le jeu était perdu d’avance. La probabilité jouait fortement contre eux. Ils devaient se vouer désormais à un Dieu, que beaucoup d’entre eux ignoraient jusque là.

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Ils s’en vont, mes frères s’en vont, mon pere et ma mere partent, pour un avenir meilleur, espérant revenir, un jour, récupérer les siens restés de l’autre côté. Mais ils ne reviendront jamais. Quelques uns réussiront à traverser la Méditerranée. D’autres n’auront pas cette chance et ne verront jamais cet « eldorado » tant vendu, naïvement rêvé. Ils seront tués; Oui, tués comme des animaux, vendus comme de la marchandise, abusés comme des objets sexuels, battus comme des chiens. Tous ces malheurs parce qu’ils auront simplement espérés une meilleure vie. Cet espoir que leurs États ont échoué à leur garantir; un environnement stable, offrant des possibilités.

L’entrepreneuriat par exemple; car si nous analysons de plus prêt, jamais le secteur public réussira à absorber cette main d’œuvre. Le secteur privé fera sa part, mais cette jeunesse aura irrémédiablement besoin d’être formé, pour monter un projet, lancer un business. Il faudrait pour cela un minimum de stabilité et un environnement sain. Cet argent économisé pour financer la route de la mort, pourra servir à les financer dans un premier temps. Commencer petit et rêver grand, leur dignité restera intact, et ils contribueront au développement de leur continent.

Hélas, trop souvent, cette jeunesse est laissé pour compte, aucune structure pour les guider, pour leur redonner espoir. Ceux la qui ont promis garantir leurs droits, préfèrent s’enrichir à titre personnel, déconnectés des réalités que vivent leurs compatriotes. Égoïsme? Manque de responsabilité? Ou simple méchanceté? Cette célèbre citation de Plaute prend tout son sens, « Homo homini lupus est », Hobbes avait compris que « l’homme est un loup pour l’homme », son pire ennemi.

Cela dit, il serait naïf de penser que la solution à apporter à cette tragédie serait simple, tant les motivations de ces milliers de candidats à l’immigration sont davantage de l’ordre de la croyance, que de l’éventualité objectivement  évaluée  d’une qualité de vie à la hauteur des risques pris et des sacrifices réalisés. L’absence de décisions de nature politique, tout comme d’actions concrètes et d’envergure visant à endiguer le phénomène se fait cruellement sentir, et nous faisons face à un extraordinaire silence médiatique provenant de nos différents pays pourvoyeurs de candidats à cette voie  d’immigration.

Ces pays du continent africain sont face à un nouveau défi, pour lequel ils paraissent de toute évidence démunis et prêt à ouvrir les bras à toute mesure salvatrice initiée et portée encore une fois par des nations dont les intentions et choix politico-diplomatiques ne cesseront pas pour autant, à juste titre ou pas, d’être pourfendues.

K.A.S & A.B

 

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